• La séparation de fait précède couramment le dépôt d'une requête en divorce et l'audience de tentative de conciliation qui s'ensuit. Une séparation de fait est une séparation non décidée par un juge aux affaires famililales. Une séparation de droit résulte de la décision d'un juge. En théorie, la séparation de fait est contraire à l'article 205 du code civil imposant aux époux de cohabiter. L'article 108 du code civil précise toutefois que le mari et la femme peuvent avoir un domicile distinct sans qu'il soit porté atteinte à la communauté de vie. Mais un domicile distinct autorisé par la loi et une communauté de vie, n'est-ce pas antinomique ? Les couples non cohabitant, les fameux CNC, sont maintenant légion dans certaines couches de la population. Un nouveau style de vie matrimoniale propre à chacun. Les organisations matrimoniales sont maintenant plurielles avec une communauté de vie à géométrie variable.

    Deux types de séparation de fait peuvent se rencontrer.

    D'abord la séparation convenue d'un commun accord entre deux époux qui décident de ne plus cohabiter.

    En général, cette séparation devance un divorce par consentement mutuel. Chaque époux prend ses distances pour mieux réfléchir. On observe néanmoins nombre de couples vivant ainsi pendant des mois, voire pendant des années, organisant leur patrimoine. Dans l'hypothèse où le couple a des enfants mineurs ou majeurs à charge, ce scénario est moins fréquent car les questions d'ordre financier et d'organisation de la vie des enfants génèrent souvent des difficultés.

    Il est indispensable pour les époux de formaliser un écrit constatant leur accord réciproque pour cesser de cohabiter, même si la portée juridique de ce document ne peut s'imposer aux tiers. L'écrit précise notamment le remboursement des prêts, l'organisation de la vie des enfants, le montant des contributions à l'éducation et à l'entretien, les modalités d'occupation du domicile conjugal, les modalités d'exercice de l'autorité parentale, le partage et l'usage des meubles, des véhicules, les modes de gestion des comptes joints...etc...

    Mon cabinet aide très fréquemment les conjoints à la rédaction de ces écrits dont tous les termes sont importants. Ces écrits peuvent participer à la pacification de la situation familiale. L'avocat utilise à la fois ses prérogatives de médiateur et de juriste. Une consultation d'un montant de 70 euros TTC suffit en général pour aider à la mise au point de ce document essentiel.

    Il y a ensuite la séparation de fait imposée par l'un des époux.

    L'un des deux époux quitte le domicile, sans l'accord del'autre, sans le consulter, sans le prévenir. La rupture est brutale, imposée, non négociée. Le conjoint qui quitte le domicile conugal dans ces conditions est en tort et peut subir les conséquences d'un divorce pour faute sur lequel nous reviendrons dans une autre rubrique.

    Naturellement, l'épouse ou l'époux, en danger physique ou malmenée psychiquement, prendra soin de faire une main-courante, à la gendarmerie ou au commissariat afin d'expliquer les conditions du départ. Il convient absolument de noter la date de la main-courante afin de permettre à l'avocat de se la procurer.

    Cette main-courante dépourvue de valeur juridique reste incontournable en pratique. Le conjoint en danger ne doit pas en effet attendre les coups et les séquelles parfois irréversibles pour quitter le domicile et porter plainte. Certains juges aux affaires familiales se montrent réticents devant ces main-courantes. Mais l'avocat doit exposer le contexte et renforcer le dossier en sollicitant des attestations de tiers suffisamment précises et circonstanciées afin de confirmer les événéments.

    Je conseille au conjoint en danger, en général, l'épouse, de partir avec les enfants mineurs, lorsque c'est possible. La pratique démontre que les juges aux affaires familiales en tiennent compte dans les conflits relatifs à la fixation de la résidence des enfants.

    Il est possible pour le conjoint d'obtenir l'expulsion du domicile conjugal du conjoint violent via une ordonnance de référé-protection ou d'éviction du conjoint du domicile conjugal.

    Nous reviendrons dans une chronique spécialisée sur ces procédures particulières.

    Le conjoint en danger sera donc contraint de quitter provisoirement son domicile mais sera ensuite en mesure de le réintégrer avec ses enfants.

    Dans ces deux cas, la séparation de fait ne protège pas les époux des dettes contractées par l'un ou par l'autre. La séparation de fait n'entraîne pas la séparation de biens et reste sans incidence sur le patrimoine des époux, contrairement au divorce et à la séparation de corps.

    Quelles sont les conséquences juridiques des séparations de fait ?

    La séparation de fait organisée ou subie entraîne lorsu'elle a duré au moins deux ans le prononcé du divorce pour altération définitive du lien conjugal.

    Il faut diligenter une procédure adéquate devant le Tribunal de Grande Instance. Le prononcé du divorce n'est pas automatique et peut parfois demander quelques mois.

    La séparation de fait entraîne également un report des effets de la dissolution de la communauté entre les époux. Elle est donc prise en compte pour la composition des patrimoines de chacun lors de la liquidation du patrimoine commun.

    L'imposition des époux est applicable de plein droit lorsque les époux sont mariés sous le régime de la séparation de biens à compter de la date de séparation de fait. (article 6-1 du CGI).

    La séparation de fait entraîne une majoration du revenu de solidarité active et des allocations familiales. En pratique, les CAF exigent que le conjoint aidé, justifie avoir sollicité une contribution à l'éducation et à l'entretien à l'autre conjoint.

    Dans l'hypothèse du non-prononcé du divorce, l'article 258 du code civil enjoint au juge d'organiser la séparation de fait, en prévoyant une contribution aux charges du mariage. Le juge répartit les charges financières du couple.

    La séparation de fait peut être bénéfique. Elle peut être aussi catastrophique si un conjoint s'endette. Une requête en divorce est très souvent déposée sans tarder.

    Maître Vincent Ricouleau - Avocat - 14 rue Pierre Morin, 44 130 BLAIN - 06 82 42 81 33 -





    Suivre le flux RSS des articles de cette rubrique